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Au fil des mots [fr]

Les temps modernes au bout de la lorgnette du philosophe Michel Onfray (2ème partie) Et demain ?

Isabelle T. Decourmont

« Ce qui faisait notre civilisation n’est pas défendable sauf à passer pour un conservateur, voire un réactionnaire, quand ce n’est pas pis. »

Cette phrase du dernier livre de Michel Onfray « L’art d’être français », paru en ce printemps 2021, reflète en quelques mots le malaise que ressent l’auteur face aux coups de boutoir portée à notre civilisation par divers courants et personnalités, dont il décrit au travers de onze lettres l’historique, les intentions, les conséquences de leurs conceptions de l’Homme, du Bien et du Mal, l’activisme qu’ils propagent en vue de façonner  le nouveau visage et la nouvelle nature de  la société qu’ils souhaitent voir apparaître.

La première lettre du livre, qui était l’objet de l’article précédent, présentait ce qui au fil des deux mille ans passés  permis de constituer, strate après strate, au travers de son histoire et d’individus remarquables la substance, la nature, le caractère de l’âme française au cœur de ce qui se nomme la civilisation européenne, sa pensée, sa philosophie, sa culture, dont l’essence première est le christianisme. 

Les conceptions délétères, qui ébranlent l’édifice séculaire, ne datent pas de l’après guerre bien qu’au fil du demi siècle passé la déstructuration se soit emballée. Déjà Freud et sa théorie psychanalytique basée sur l’invention d’un inconscient, force cachée qui selon lui nous domine et dirige actes, pensées, lapsus, désirs, balaie ainsi la puissance du conscient.

Onfray déconstruit la psychanalyse en crevant les concepts dont il ne subsiste alors qu’un discours fumeux formé d’amalgames et d’hypothèses, réinterprétation du vouloir de Schopenhauer et de la volonté de puissance de Nietzsche qui aboutit à ce que l’on nomme aujourd’hui l’inconscient freudien, « l’inconscient de Freud » ironise Onfray, « inconscient métapsychique sans réalité physique, anatomique, corporelle, matérielle mais qui existerait tout de même ? Des scènes de la préhistoire…hordes primitives, domination de quelques mâles sur les femelles….souvenirs passant d’un individu à l’autre de façon phylogénétique.» La structure sociale, toujours selon Freud, aurait été imaginée par des fils assassins du père, un mâle dominant dont ils auraient voulu se débarrasser et dont ils auraient mangé le corps, qui auraient inventé la loi, les organisations morales, les interdits de la religion et ceux de la société après s’être aperçu de l’énormité de leur crime ». Quant à sa théorie de l’enfant, elle est celle d’un être sexué, un « pervers polymorphe sans digues morales ». Ajoutons sa théorie de la bisexualité de tous les humains, chacun de nous n’étant qu’un peu plus masculin ou un peu plus féminin, selon qu’il soit homme ou femme. Vision qui ressurgit telle un geyser dans la théorie du genre.

J’ajouterai à l’analyse de Onfray, que le monde fantasmagorique de Freud, pourrait bien avoir son origine dans l’ancien testament, lecture qui encadra son enfance d’enfant juif, son dieu cruel et vengeur, cette présence invisible et omniprésente qui punit, damne même et au courroux duquel nul ne peut se soustraire, histoire du peuple élu, longue suite de guerres, meurtres interfamiliaux, du père, du frère, du fils, viols, incestes. Enfin le traumatisme de la circoncision que Freud a subi enfant pourrait expliquer que la crainte de l’émasculation ait fait du sexe l’unique et obsessionnelle clef d’interprétation de la psyché humaine. Au maître tout puissant de la psychanalyse il a manqué un superviseur.

La propagation de la psychanalyse fut ravageuse. Il ne croyait pas si bien dire quand il déclara en arrivant à  New York le 29 août 1909 : « Nous leur apportons la peste ». Non seulement à New York et à sa société puritaine mais au monde entier. Onfray affirme que de la théorie freudienne du « tout inconscience » résulte évacuation de l’histoire, que lorsque s’y arrima le marxisme, selon lequel tout découle des rapports de productions économiques, la subjectivité fut évacuée, et que le freudo-marxisme était né.

Celle-ci eut pour maître à penser Wilhelm Reich « pour qui l’inconscient est corporel et interactif à l’histoire », qui « défend une pédagogie libertaire », pour exemple «  il faut apprendre aux enfants à libérer leur sexualité ».

Suivit le ravage de l’utopie libidinale de Deleuze et Guattari, du pan sexualisme à la Gide et nombreux autres auteurs pédophiles, des membres du monde politique ou intellectuel, fêtés alors sans complexe par la société « éclairée » du Tout Paris des années 70-80. En 1977 parut un texte, publié dans le journal Le Monde, écrit par l’écrivain Gabriel Matzneff et co-signé par 69 personnalités du Tout Paris qui demandait que la pédophilie soit décriminalisée.

Parmi les signataires on trouve Louis Aragon, le sémiologue Roland Barthes, Simone de Beauvoir Jean Paul Sartre, ardents pratiquants de la chose, le cinéaste Patrice Chéreau, le philosophe Gilles Deleuze, l’auteur André Glucksmann, Catherine Millet. Quant à Cohn-Bendit, petit délinquant de 68 en révolte contre la société de consommation, pédophile fier de l’être et qui s’en vante dans un livre, il sera un jour maire écolo de Francfort sur le Main en Allemagne et est aujourd’hui encore reçu comme conseiller politique dans les médias français.

En 2020 seulement les ravages causés par ces prédateurs éclatent grâce à quelques retentissants procès. 

La fameuse gauche intellectuelle post soixante-huitarde parisienne défendait cette « liberté de pensée », ce progressisme qui faisait « enfin » tomber la vieille morale contraignante de cette société bourgeoise qu’elle vilipendait tout en y appartenant. Tout est dans «  Le deuxième sexe » de Beauvoir.

Alors que Freud souhaite un régime fort qui contienne les manifestations pulsionnelles, le freudo-marxisme prône l’inverse: la libération des pulsions et des instincts, pour s’en convaincre il suffit de lire Marcuse.

L’auteur ajoute : « Les philosophes déconstructionnistes français (Deleuze, Foucault) démarquent les lignes de force du freudo-marxisme. Foucault introduit la déculpabilisation du coupable au profit de la culpabilisation de la société capitaliste (Surveiller et punir. Foucault, 1975). Il affirme que la prison n’est pas dans la seule prison mais partout dans la société,  micro-fascismes de l’école, de la famille, de la police, dans l’armée, les hôpitaux, contre lesquels il faut se révolter en groupes séparés pour se retrouver dans la convergence des luttes, visible aujourd’hui alors que se rejoignent luttes anti racialistes, indigénistes, néo-féministes. Pour eux, la civilisation judéo-chrétienne est source de crimes et d’injustice, « blanche, colonisatrice, oppressante, tournée vers l’Un, elle a pour foyer la mer Méditerranée, creuset généalogique du monothéisme ».

Cette Gauche aveugle qui se veut d’avant-garde, semble hélas de toutes les mauvaises causes, qu’elle soit de France ou d’ailleurs. Nouveau temps, nouveau combat, elle est devenue verte. Elle s’agenouille devant une petite fille qui apprend bien ses leçons, manipulée par ses parents et leurs amis, rencontre du show business et de requins financiers pour qui toute cause est bonne, tant qu’elle remplit les caisses. L’égérie du capitalisme vert des pays industrialisés de la planète (les autres pays et cela commence à la frontière russe, ayant encore gardé un peu de bon sens)  a perdu tout le charme de l’innocence et de la beauté enfantines et sur son visage on ne lit que haine, hostilité, menace, intolérance, renforcées par ses discours.

Dans sa sixième lettre, Onfray aborde la question de l’islamo-gauchisme. Une vieille histoire française, alors que Sartre, lui encore, fut un « ami » et soutien de l’ayatollah Khomeyni, extrémiste islamiste, qui mal vu du gouvernement du Shah d’Iran, s’était réfugié en France. Quand il retourna dans son pays après la chute du régime impérial pour succéder au Shah, il créa la République Islamiste, purgea le pays des indésirables, organisa une boucherie où des dizaines de milliers de personnes seront massacrées, instaura un régime de la Charia et de la terreur, que nous avons vu renaître en Irak voici quelques années.

Sartre, n’était pas à une contradiction près, lui qui retourna sa veste au point qu’il ne devait plus savoir où en était l’endroit et l’envers au crépuscule de sa vie. Méprisant la « populace » pendant le Front Populaire de 1936, mais vendant en 1968 la Pravda, le journal du parti communiste, en compagnie d’étudiants sur les trottoirs de Saint Germain des Prés. Sartre qui  trouvait l’occupant sympathique pendant la guerre mais se dit résistant à la libération. Lui qui alla rendre visite à tous les dictateurs de la terre, Staline, Mao, Castro, Kim Il Sung et rendit hommages aux « terroristes palestiniens qui avaient tué des athlètes israéliens aux J.O. de Munich en 1972 »+ mais  vit dans le nationalisme, l’impérialisme, le colonialisme, ce qui incarne la loi du père. Il fut aussi le défenseur des assassins qu’était le groupe terroriste allemand de la Fraction Armée Rouge (RAF) ou Bande à Baader, à l’origine étudiants du SDS (association de gauche des étudiants allemands) qui se révoltent contre la manière traditionnelle d’enseignement de l’université, qui se radicalisera. Elle entre dans l’action terroriste, s’entraine dans des camps du Fatah, pose des bombes en Allemagne dans les grands magasins, les rues et au quartier de l’armée américaine, faisant nombre de morts et blessés, attaque des banques, développe le concept de guérilla urbaine, qui sévit aujourd’hui dans les banlieues françaises.

La Gauche de Sartre et ses aficionados, qui se retrouvent à l’Université, particulièrement celle des sciences humaines et du droit, dans le milieu du show business (il faut être à la mode et se faire aimer du bon peuple), dans les médias, chez les penseurs, écrivains, philosophes (il faut vendre du papier),  ces bien pensants, seuls détenteurs selon eux des valeurs humaines, mondialistes, onusiens, droits de l’hommistes, alors que les autres partis politiques ne seraient qu’un amas de barbares, colonialistes, xénophobes, capitalistes, la Gauche, disais-je, bien sûr seule défenseur des Droits de l’Homme et du citoyen, auquel on devra sans aucun doute ajouter bientôt et de la femme et de la citoyenne, est celui des musulmans vivant en France, pauvres opprimés, dit-on.

On se demande alors pourquoi ils ne restent pas ou ne retournent pas dans leurs pays, qui ne sont plus dirigés par les affreux colons, mais quittent leur pays pour rejoindre leurs tortionnaires dans leur propre pays.

Comme les bons sentiments sont très proches de l’aveuglement, c’est aussi les islamistes même les plus radicalisés que la gauche soutient. Cela s’appelle l’islamo-gauchiste, auquel Onfray consacre un chapitre : «  le clocher, non, le minaret, oui. Le pape, non, l’ayatollah, oui. La Bible, non ; le Coran, oui. La misogynie, l’homophobie et la phallocratie catholiques, non ; le patriarcat, la chasse aux homosexuels, les mutilations sexuelles, oui. Les croisades, non ; le djihad, oui. La croix, non ; le croissant, oui. »

Depuis Sartre et Foucault, l’histoire de la France est « celle de la longue allégeance du pays aux revendications islamo-gauchistes : islamo-syndicalisme, exacerbation du droit à la différence, éloge du voile islamique, attaque de la liberté de conscience, réactivation du vieil antisémitisme musulman, refus de l’enseignement laïc, présentation de l’immigration comme une chance pour la France ». Certes des émigrés furent une chance pour la France. Je citerais tous domaines confondus, Marie Curie, Troyat, Kessel, François Cheng, Edouard Balladur, Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor, Andrée Chedid, Hélène Carrière d’Encausse pour ne citer que quelques noms. Ceux là ne sont pas en cause.  Mais ceux qui crachent sur le pays qui les a reçus, élevés, nourris ?

L’esprit français est en voie d’extinction selon Onfray. La grossièreté a remplacé l’ironie et l’humour, elle défile en boucle sur les écrans et les ondes, même du service public. La langue française n’est plus enseignée, elle devient un sabir d’illettrés, héritage d’une école où depuis 40 ans on n’enseigne plus le français, sa grammaire, ses auteurs, où l’Education Nationale a banni les classiques du programme. Demain : antispécisme, décolonialisme, créolisation, théorie du genre, post féminisme devenu misandrie, moralisme, écologisme, transhumanisme. Concepts du futur, d’un univers mondialisé, d’une civilisation globale, mais peut-on l’appeler encore civilisation ?

*Edwy Plenel, figure médiatique de la Gauche, auteur de « Pour les musulmans », rédacteur du site Médiapart, commentant les attentats de Munich en1972: « Aucun révolutionnaire ne peut se désolidariser de Septembre Noir ». Après les attentats contre le journal Charlie Hebdo : « Je ne suis pas choqué ».

Michel Onfray, « L’Art d’être français, Lettres à de jeunes philosophes »  ISBN : 9782382920091

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